Rien d’officiel est fait de cinq récits. Chaque récit s’adosse à une grande pièce de Shakespeare. Pas besoin pourtant de connaître Shakespeare pour lire Rien d’officiel : tout est dans le livre, ce qu’il faut savoir, on vous le dit, ce qu’il faut résumer on vous le résume. De quoi ça parle alors ? D’aujourd’hui, de notre époque, de ce qu’on peut voir sur les images des télés, le chaos du monde, sa futilité et son tragique, sa violence ; ça parle de ce qu’on peut entendre à la radio, de ce qu’on peut lire dans les journaux. Rien d’officiel, c’est le bruit du monde qui vient souffler à vos oreilles. Deux hommes, trois femmes prennent successivement la parole. Ils racontent des événements qui leur sont arrivés. Ce sont des récits de colère, donc des récits toniques. Si on veut mieux vivre, si on veut vivre tout simplement, il faut garder l’œil ouvert et n’avoir pas sa langue en poche.
Dans « Ophy, Ham et Moi », Horatio dans le TGV se souvient de son amour pour Ophélie. Qui l’a assassinée ? Car Ophélie ne s’est pas suicidée comme on le dit, on l’a purement et simplement assassinée, oui, comme la Princesse Diana, pense Horatio. C’est difficile d’avoir vingt ans aujourd’hui dans un monde qui brade si facilement sa dignité.
Dans « Pas de Partouze pour Dunisane », la gouvernante des enfants de Mac et Lady Mac est jugée par le tribunal pénal international pour collaboration avec la dictature. Est-ce juste ? Que sait-on d’une vie sous dictature ? La jeune femme se défend bec et ongle, elle a des justifications à faire valoir.
Dans « Ex Magic Boy », Ariel vieilli passe sa vie à se bagarrer dans les bars. Après lui avoir donné des pouvoirs magiques (pensez : Ariel pouvait voyager dans les airs et commander aux océans !), Prospero son ancien maître l’a viré pour faute grave. Maintenant, Ariel zone entre le bistro et les urgences. Quand on se bat, il y a de la casse et il faut recoudre tout cela. Heureusement, il tombe sur un urgentiste lettré qui a gardé un certain sens de la grandeur.
Dans « Et, hop, la pommade ; et, hop le sirop ! », la fille du bouffon du roi L est rentrée dans son pays pour retrouver son père. Tout a très mal tourné depuis que le vieux monarque a voulu partager son royaume et quitter le pouvoir de son vivant. On ne quitte pas le pouvoir comme ça ! La fille du bouffon n’a jamais aimé le roi. Franchement, elle le hait, « un vieux con plus lifté que Liz Taylor et Berlusconi réunis », dit-elle. Voir son père humilié en permanence par les grands du monde n’apporte aucune sérénité d’esprit.
Dans « Moi contre tous », Valeria, vingt ans après les événements veut tourner un film sur Marco, un jeune général qui a sauvé le pays du massacre puis est passé dans le camp ennemi pour combattre les siens ; un peu comme Pétain, dit Valeria, héros de 14, traître de 40. Ça jette un froid. C’est difficile de négocier un film avec une chaîne de télé : les producteurs sont des rase-moquette, c’est ce que pense Valeria.
2011, publication aux Editions Aden